- règne
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1 ♦ Exercice du pouvoir souverain considéré dans sa durée, ses modalités; période pendant laquelle s'exerce ce pouvoir. Le règne de Louis XIV. Sous le règne du tsar Pierre le Grand, de Napoléon. Un long règne. Les dernières années de son règne. Période entre deux règnes. ⇒ interrègne.♢ Par ext. Période d'exercice d'un pouvoir politique absolu. Le règne de Robespierre, de Staline.2 ♦ Fig. Domination, pouvoir absolu d'une personne, d'une catégorie de personnes. Le règne des banquiers. « C'est le règne du mufle » (Duhamel).♢ (1670) Influence prédominante (⇒ prédominance, primauté), pouvoir absolu d'une chose. Le règne de la justice et de la fraternité. Le règne de la facilité, de l'irresponsabilité.II ♦ (1762; fig. de l'a. sens « royaume ») Règne minéral (vx), règne végétal, règne animal : les trois grandes divisions de la nature, selon l'ancienne classification de Linné ( XVII e). Étude du règne végétal (botanique), animal (zoologie). Règne bactérien. Règne divisé en embranchements et en classes. III ♦ (1690) Didact. Couronne suspendue au-dessus du maître-autel, dans certaines églises. — Chacune des trois couronnes superposées de la tiare pontificale (dite trirègne).Synonymes :- emprise- pouvoir- prestigeInfluence considérable exercée par une idée, un principe, sur la...Synonymes :- empire- prédominancerègnen. m.rI./rd1./d Gouvernement d'un prince souverain; durée de ce gouvernement. Sous le règne de Louis XIV.|| Par ext. Le règne de tel ministre, de tel chef d'état.d2./d Domination, influence prédominante (d'une personne, d'un groupe, d'une chose). Le règne de la justice.rII./r Chacune des grandes divisions que l'on distingue dans la nature. Règne végétal, animal.⇒RÈGNE, subst. masc.A. — [Corresp. à régner]1. Domaine pol.a) Action, fait pour un monarque, une dynastie de régner. Instrument de règne. [Se déclarer] contre le règne des Bourbons au Nouveau-Monde (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 229). À mesure qu'on avançait dans le siècle, Fénelon pensait avec plus de sollicitude au règne possible de son élève chéri (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 529).b) P. méton. Manière de régner; durée pendant laquelle un monarque, une dynastie règne; période historique correspondante. La Hongrie était alors gouvernée par le roi André II, dont le règne était aussi agréable à Dieu qu'à ses peuples (MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p. 6). Le saint roi [Louis IX] a près de lui une véritable sainte. Quel est ce règne étonnant qui s'ouvre? (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 70).SYNT. Le règne de Charlemagne, de François Ier, de Louis XIV, de Napoléon, de la reine Victoria; règne brillant, paisible; long règne; l'éclat d'un règne; les premières, les dernières années d'un règne; au début, à la fin d'un règne; pendant, sous le règne de.♦ Le grand règne. Le siècle de Louis XIV. Synon. le grand siècle. Bossuet, installé dans sa chaire d'évêque à l'époque la plus solennelle du grand règne (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 238).c) P. anal. Le règne de la Terreur. Le renversement de la constitution et le règne des Trente Tyrans à Athènes (CHATEAUBR., Essai Révol., t. 2, 1797, p. 84). Quelle que soit l'issue du règne de de Gaulle (MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p. 362).2. a) Influence prédominante, pouvoir absolu, domination d'une personne, d'un ensemble de personnes; durée correspondante. Le règne de l'homme. [Marguerite, à son père:] Vos enfants vous entoureront d'amour et de respect; mais d'aujourd'hui vous m'appartenez, et me devez obéissance. Soyez sans inquiétude, mon règne sera doux (BALZAC, Rech. absolu, 1834, p. 280). L'ordre abstrait issu de la Révolution (...) assure le règne positif de la bourgeoisie française (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 109).— Le règne de qqn dans, sur qqc. Son règne [de Victor Hugo] sur les lettres françaises (ZOLA, Doc. littér., Hugo, 1881, p. 41). Boucher a vu consacrer son règne dans les arts (NOLHAC, Boucher, 1907, p. 111).— Du règne de qqn. Du temps où quelqu'un exerçait son influence, sa domination. La noble simplicité qui se faisait admirer du règne du marquis de Roquefeuille (JOUY, Hermite, t. 5, 1814, p. 253).— Région. (Canada). Vie (de quelqu'un). Nous aurions été au milieu d'une belle paroisse où Laura aurait pu faire un règne heureux (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 240).b) Prépondérance plus ou moins absolue, domination de quelque chose; durée correspondante. Au règne éphémère de l'amour a succédé, pour le reste de la vie, le règne plus sérieux de la conscience (PROUDHON, Pornocratie, 1865, p. 57). La disparition soudaine des grands acteurs coïncide avec le règne de l'écran, cela saute aux yeux (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 170).SYNT. Le règne de l'argent; le règne de l'esprit, de la force, de la justice, de la liberté, du mal, de la raison; le règne absolu de qqc.; établir, inaugurer, instaurer le règne de qqc.— DR. Règne de la loi. ,,Régime juridique dans lequel les gouvernants et leurs agents sont assujettis, pour leurs décisions particulières, à l'observation des règles de droit posées par la loi ou le règlement`` (CAP. 1936). ,,Régime juridique soumettant les agents de l'État, comme les simples particuliers, à l'empire de la loi commune appliquée par le juge du droit commun`` (CAP. 1936). Faire une distinction entre les sociétés régies par la coutume et celles qui sont soumises au règne de la loi (Traité sociol., 1968, p. 207).c) Vx. Être en règne. Être en vogue, en crédit, à la mode. (Dict. XIXe et XXe s.).B. — [Corresp. à règne au sens vx de « royaume »]1. a) Ensemble d'êtres présentant un principe, des caractères communs. Règne humain, vivant. Il se trouve nécessairement des êtres intermédiaires qui séparent le règne des instinctifs du règne des abstractifs (BALZAC, L. Lambert, 1832, p. 208). L'instinct populaire emprunte ses plus injurieuses réprobations au règne des poissons (DU BOS, Journal, 1927, p. 194).b) SC. NAT. Chacune des divisions traditionnelles du monde sensible; réalité correspondante. Appartenir à un règne de la nature; qqc. emprunté à un règne de la nature. Nous distinguons trois règnes, le règne minéral, le règne végétal, et le règne animal; et nous comprenons l'homme dans le règne animal (P. LEROUX, Humanité, 1840, p. 114):• La connaissance qu'ont les primitifs de la faune et de la flore est incontestablement supérieure à celle du civilisé. Naturellement des raisons d'ordre utilitaire déterminent quel est le règne qui les intéresse surtout.LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 361.♦ Règne minéral.♦ Règne végétal. Division regroupant tous les végétaux; réalité correspondante. Le règne végétal, dans cette contrée (...), ne se montrait pas ingrat envers l'astre du jour, et il rendait en parfums et en couleurs ce que le soleil lui donnait en rayons. Quant au règne animal, il était plus avare de ses produits (VERNE, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 102).♦ Règne animal. Division regroupant tous les animaux; réalité correspondante. Supra ex. de Verne.♦ Règne inorganique. Règne minéral. L'intelligence est partout, même dans le règne inorganique. En voyant la régularité des formes cristallines, j'ai peine à croire que les minéraux soient aussi bêtes qu'on le dit (MÉNARD, Rêv. païen mystique, 1876, p. 109).♦ Règne organique. Division regroupant le règne végétal et le règne animal. [Les] facultés qui nous sont communes avec tout le règne organique (COMTE, Philos. posit., t. 4, 1839-42, p. 498).2. Lieu, domaine abstrait. Chaque cœur est un règne impénétrable (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 193). Chaque nuit, j'entre dans le règne des épouvantements (GIDE, Journal, 1930, p. 979).C. — THÉOL. JUDÉO-CHRÉT. Règne de Dieu. Exercice du pouvoir, action, autorité de Dieu sur les hommes et sur la création; état de perfection résultant de la reconnaissance individuelle ou collective de cette action divine, maintenant et à la fin des temps. Règne de Dieu sur la terre, parmi les nations. Comment faire, ô mon Dieu, pour que votre règne arrive? (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 242).— RELIG. CHRÉT. Règne de Jésus(-Christ), du Christ. Action, influence sur les hommes du Fils de Dieu triomphant du péché sur la Croix et premier-né d'une création nouvelle; réalité qui en résulte, déjà présente et à venir. [Jésus] m'a choisi (...) pour établir et pour étendre dans les cœurs son règne bienfaisant et pacifique (BILLY, Introïbo, 1939, p. 156).♦ [P. allus. à la parole du Christ (Jean XVIII, 36) Mon règne, mon royaume n'est pas de ce monde pour dire que son pouvoir n'est pas d'ordre temporel] Je suis entouré de prêtres qui me répètent sans cesse que leur règne n'est pas de ce monde, et ils se saisissent de tout ce qu'ils peuvent (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 748).— P. anal., PHILOS. [Chez Kant] Règne des fins. ,,État dans lequel les volontés des êtres raisonnables sont censées s'accorder entre elles et avec l'ordre du monde`` (AUR.-WEIL 1981). Kant achève sa morale dans l'idée d'un règne des fins (J. VUILLEMIN, Essai signif. mort, 1949, p. 229).D. — [Le subst. désigne un objet concr.]1. Chacune des trois couronnes de la tiare pontificale. (Dict. XIXe et XXe s.).2. Dans certaines églises, couronne suspendue au-dessus du maître-autel (Dict. XIXe et XXe s.).Prononc. et Orth.:[
]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: rè-. Étymol. et Hist. A. 1. 2e moit. Xe s. « royaume » (St Léger, éd. Linskill, 132); 2. 1170 « exercice du pouvoir royal » (WACE, Chronique ascendante, éd. A. J. Holden, 5773); 3. fig. a) 1636 « domination de personnes puissantes » (MONET); b) 1670 « pouvoir, influence qu'exerce une chose » (BOSSUET, Duchesse d'Orléans ds LITTRÉ); c) 1694 terme de relig. règne de Jesus-Christ (Ac.). B. P. ext. 1. 1652 « tiare du pape » (GUEZ DE BALZAC, Socrate Chrétien, X ds LITTRÉ); 2. 1690 « couronne suspendue sur le maître-autel des églises » (FUR.). C. 1730 règne animal, règne végétal, règne minéral (DU MARSAIS, Des Tropes, p. 33); 1764 règne organique (BONNET, Contempl. Nature, p. 33). Empr. au lat. regnum « autorité royale », « souveraineté », « royaume », dér. de rex, regis « roi ». Fréq. abs. littér.:2 445. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 5 616, b) 2 722; XXe s.: a) 2 445, b) 2 680. Bbg. CARMIGNAC (J.). Règne de Dieu ou royaume de Dieu? Foi Lang. 1976, n ° 1, pp. 38-41. — DUB. Pol. 1962, p. 401.
règne [ʀɛɲ] n. m.ÉTYM. Fin Xe, « royaume »; empr. du lat. regnum.❖———1 Vx. Royaume.2 (1762). Fig. || Règne minéral, règne végétal (→ Drogue, cit. 1), règne animal (→ Bête, cit. 1; généalogique, cit. 2; prototype, cit. 1) : les trois grandes divisions de la nature sensible selon la classification de Linné. — REM. On ne dit plus règne minéral et la limite entre les règnes animal et végétal est incertaine. — Étude du règne végétal (⇒ Botanique), animal (⇒ Zoologique). || Règne bactérien. || Division d'un règne en embranchements et en classes. || Le Règne animal distribué d'après son organisation, œuvre de Cuvier.1 Je prévois qu'on pourra nous faire deux objections, la première, c'est que ces grandes divisions que nous regardons comme réelles, ne sont peut-être pas exactes, que, par exemple, nous ne sommes pas sûrs qu'on puisse tirer une ligne de séparation entre le règne animal et le règne végétal, ou bien entre le règne végétal et le minéral (…)Buffon, Hist. nat., 1er discours.2 Aux yeux du naturaliste, zoologie et botanique sont inséparables (…) Toutefois le monde vivant est si vaste que s'est maintenue pour les hommes de science, en dépit de l'identité foncière des deux règnes, l'habitude de conserver les distinctions admises par les profanes (…)F. Moreau, in Encycl. Pl., Botanique, Introd., p. 12.3 a Philos. anc. Vaste ensemble d'êtres unis et gouvernés par un principe commun (Lalande). || « Le règne physique de la nature et le règne moral de la grâce » (Leibniz). ⇒ Monde. || Correspondances, harmonies entre les règnes.b Relig. || Le règne de Dieu. ⇒ Royaume (→ Instaurer, cit. 3). || « Notre Père qui êtes aux cieux, Que Votre règne arrive… » (Évangile selon saint Luc, XI, 2).3 Que votre règne arrive. Quoi ? si vous ne le demandiez pas, le règne de Dieu ne viendrait pas ? Il parle de ce règne qui arrivera à la fin des siècles; car Dieu règne toujours, et n'est jamais sans régner, lui à qui toute créature obéit. Mais quel règne désirez-vous, sinon celui dont il est écrit : Venez, vous qui avez été bénis par mon Père, et recevez le royaume. Voilà ce qui nous fait dire : Que votre royaume arrive. Nous prions que ce royaume soit en nous : nous demandons d'être unis dans ce royaume (…)Bossuet, Instructions sur les états d'oraison, 1er traité, Add. et Correct., II.———II (V. 1155). Exercice du pouvoir royal, et, par ext., du pouvoir souverain dans une monarchie (au sens large).1 Vieilli. Le fait de régner (sans notion de durée). ⇒ Gouvernement (infra cit. 16), 2. pouvoir. || Thèbes… craint le règne d'un prince (→ Province, cit. 2). || Soumettre des provinces à son règne (→ Baigner, cit. 1).2 Exercice du pouvoir souverain considéré dans sa durée, ses modalités; période de l'histoire d'un pays pendant laquelle s'exerce ce pouvoir. || Le règne de Louis XIV. || Le règne du tsar Pierre le Grand (→ Despote, cit. 5), de Napoléon (→ Anneau, cit. 4). || Sous le règne de… ⇒ Époque (→ Inerte, cit. 4). || Un long règne, les dernières années de son règne. || Les faits de son règne (→ Annales, cit. 1). || Règne paisible (→ 1. Dire, cit. 87), glorieux (cit. 7), éclatant (→ Fastueux, cit. 3). || Période entre deux règnes. ⇒ Interrègne, régence.4 Ce règne dont nous voulons peindre quelques années, règne de faiblesse qui fut comme une éclipse de la couronne entre les splendeurs de Henri IV et de Louis-le-Grand, afflige les yeux qui le contemplent, par quelques souillures sanglantes.A. de Vigny, Cinq-Mars, II.5 1817 est l'année que Louis XVIII, avec un certain aplomb royal qui ne manquait pas de fierté, qualifiait la vingt-deuxième de son règne.Hugo, les Misérables, I, III I.♦ Par ext. (1636). Période d'exercice d'un pouvoir politique absolu. || Le règne de Robespierre (→ 2. Outre, cit. 18), de la Terreur (→ Anachronisme, cit. 4). — Par anal. || Sous le règne de la Montespan (→ Luxure, cit. 5).♦ Régional (au Canada). La vie. ☑ Finir son règne : mourir.3 (V. 1660). Fig. (De II., 1.). Domination, pouvoir absolu d'une personne, d'une catégorie de personnes. || Le règne des banquiers. ⇒ Empire, 2. pouvoir. || C'est le règne du mufle (→ Foncer, cit. 6).6 Enfin, dans ces temps où l'on prétendait que l'amour régnait en France, il me semble que la galanterie mettait les femmes, pour ainsi dire, hors la loi. Quand leur règne d'un moment était passé, il n'y avait pour elles ni générosité, ni reconnaissance, ni même pitié.Mme de Staël, De l'Allemagne, I, IV.4 (1670). Influence prédominante (⇒ Prédominance), pouvoir absolu d'une chose. || Le règne de la vérité absolue (→ Fanatique, cit. 5), de la justice et de la fraternité (→ Non-sens, cit. 2). || Fonder (cit. 9 et 23) le règne de la raison, de la vertu. || Nous aspirons au règne du cœur (cit. 169). — Par ext. Mode ou règle absolue. || Le règne des trois unités (→ Forme, cit. 47), de l'hyperbole (cit. 2).7 Dans le règne de l'égalité, et il approche, on écorchera vif tout ce qui ne sera pas couvert de verrues.Flaubert, Correspondance, 401, 20 juin 1853.♦ (Mil. XVe). Vx. || En règne : en cours, à la mode. ⇒ Régnant (Cf. Rousseau, les Confessions, VII).♦ (XXe). Dr. || Règne de la loi : « régime juridique dans lequel les gouvernants et leurs agents sont assujettis, pour leurs décisions particulières, à l'observation des règles de droit posées par la loi ou le règlement » (Capitant).———III (1690). Didact. Couronne suspendue au-dessus du maître-autel, dans certaines églises. — (1652). Chacune des trois couronnes superposées de la tiare pontificale (dite trirègne).
Encyclopédie Universelle. 2012.